jeudi, 30 mai 2013
TOUT EST POLITIQUE, VRAIMENT ?
ANSEL ADAMS : MONT MCKINLEY ET WONDER LAKE
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Donc, nous venons d’apprendre que le mariage homosexuel est « de gauche ». C’est tout le camp « progressiste » qui a emporté la décision, et la foule de ceux qui ont manifesté dans les rues (18,3 individus selon la police, « en comptant les femmes et les petits enfants », aurait dit Rabelais) ne sont que des « conservateurs », dans le meilleur des cas, des « homophobes » dans le pire, avec, entre les deux, le marécage des « réactionnaires ».
Pêle-mêle et dans le même sac, on trouve l’UMP, qui a cru qu’elle pouvait « faire un coup », et l’Eglise catholique, accusée de se cramponner à des valeurs obsolètes et sommée d’enfin mettre sa doctrine à la page, au parfum de l’époque. Elle pourrait répondre comme Cromwell : « Qui épouse son époque sera vite veuf ».
Vladimir Poutine cumule sans doute les trois tares à la fois, pour avoir déjà déclaré que la Russie ne laisserait pas adopter des petits Russes par des couples homosexuels mariés. On attend une déclaration de la Confédération Helvétique pour savoir à quoi s’en tenir au sujet des petits Suisses. Je rigole. Je ne devrais pas.
Il reste cependant étonnant, dans toute cette affaire, qu’on ait vu s’installer entre partisans et adversaires du mariage des homosexuels le bon vieux clivage, quasi paléontologique, entre une France « de droite » et une France « de gauche », étant donné que les deux partis dominant le champ « politique » (laissez-moi pouffer) sont clairement DE DROITE.
Je sais, on va me ressortir de la naphtaline et du formol la momie de Wilhelm Reich, le pape de la sexologie politique qui mettait beaucoup de névroses à l'oeuvre dans la classe ouvrière sur le compte des conditions socio-économiques qui lui étaient faites (je simplifie). Ses livres (La Lutte sexuelle des jeunes (1932), La Fonction de l’orgasme (1927) et bien d’autres) doivent toujours se trouver quelque part. Le problème, avec Reich, c'est qu'il a mal fini, avec sa machine à détecter l'orgone.
Je sais, on me dira que « tout est politique », encore que ça se dise beaucoup moins que jadis. Sans doute, rien de ce que nous faisons, disons ou pensons n’échappe à une analyse selon une grille « politique ». Cela au moins me paraît indiscutable.
Mais il me paraît tout aussi indiscutable que tout ce qui est humain est « sexuel ». Tout ce qui est humain, « économique ». Tout ce qui est humain, « religieux ». Tout ce qui est humain, « social ». Tout ce qui est humain, « psychologique ». Tout ce qui est humain, « relation au pouvoir ». On n’en finirait pas.
Il suffit de choisir sa paire de lunettes et de regarder le monde à travers. Ensuite, ce n’est qu’une question de couleur des verres. Pour choisir la couleur, il suffit d’une petite opération chirurgicale, qui consiste, depuis l’invention des « sciences humaines », à mettre l’homme sur le billot et à le couper en morceaux : une tranche pour le sexologue, une tranche pour le sociologue, une tranche pour le psychologue, une tranche pour ... Autant de tranches que de « sciences humaines ». Servez-vous, le buffet est « à volonté ».
Donc, disions-nous, rien de ce qui est sexuel n’est apolitique. Ma foi, pourquoi pas ? Je note au passage que, en tant qu'adversaire du mariage homosexuel, se faire traiter d’ « homophobe » montre bien qu'il y a en jeu quelque chose de plus ; je crois que ça montre que l’enjeu de cette ouverture institutionnelle ne se réduit pas au mariage, mais qu’il s’agit aussi et en plus de faire la promotion de l’homosexualité en tant que telle.
Si l'on ajoute à la loi votée la palme d'or offerte à un film chantant l'amour entre deux femmes (La Vie d'Adèle d'Abdellatif Kechiche), on peut dire que le tableau est complet. Jamais on n’a vu, sur n'importe quelle question touchant la sexualité, un tel battage publicitaire, un tel effort de propagande. Mais si je parle de prosélytisme, de quoi va-t-on me traiter ? Non, il est plus prudent de chanter, avec la vox populi : « Je vous déclare mari et mari ».
Un autre indice de cet enjeu : la manipulation de « l’opinion publique ». Il s’est répété, tout au long de la campagne pour le vote de la loi, que les sondages étaient unanimes à trouver dans la population française une approbation du mariage homosexuel par plus de 60 % des gens, parfois plus.
Sans parler de la futilité des conditions dans lesquelles sont pratiqués les sondages (j'en ai longuement parlé dans le passé), je lis dans Le Progrès (27 mai pour la "question du jour", puis 28 mai pour la réponse) une statistique légèrement différente. Il est vrai que la question ne porte pas sur le mariage homo, mais sur les manifs "anti". On me dira que ce ne sont que 4064 internautes qui ont répondu à cette « question du jour », mais j’attends qu’on me dise en quoi ce genre de réponse est moins valable que n’importe quel sondage. Et ce qu'il en serait, si la question portait sur le principe lui-même de ce mariage.
EN HAUT LA QUESTION, EN BAS, LE LENDEMAIN, LA REPONSE.
LÀ, C'EST PLUTÔT UNE FRANCE CONTRE L'AUTRE.
Mais tous les médias, toutes les autorités, toutes « les associations » nous ont tellement martelé qu'il y a un consensus au sein de la société, qu'on est tout surpris de constater que la quasi-unanimité a tous les caractères d'une fable. Tiens, que pensez-vous de Les Animaux malades de la peste ?
Voilà ce que je dis, moi.
09:00 Publié dans BOURRAGE DE CRÂNE | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : photographie, ansel adams, mariage gay, mariage pour tous, manif pour tous, mariage homosexuel, homosexualité, homophobie, ump, église catholique, vladimir poutine, la vie d'adèle, palme d'or, cinéma, festival de cannes, abdellatif kechiche, wilhelm reich, la fonction de l'orgasme, opinion publique, sondages, presse, le progrès
jeudi, 15 mars 2012
BESOIN DE GRANDS DIABLES
BESOIN DE DIABLES
Qui se souvient de SLOBODAN MILOSEVIC ? Qui a encore en mémoire le nom de SADDAM HUSSEIN ? Que reste-t-il de KIM JONG IL dans les flashes d’actualités ? Et de son cher papa, le « président éternel », le « grand leader », le « professeur de l’humanité entière », le « cher dirigeant » KIM IL SUNG ? Et du grand NICOLAE CEAUCESCU, se rappelle-t-on qu'il fut pour nombre de Roumains, plutôt de force que de gré, le « Danube de la Pensée » ? Le « Génie des Carpathes » ?
LE « CONDUCATOR »
C’est que tout passe, tout lasse, et que le firmament des despotes a tendance à s’encombrer. Y brillèrent, en des temps plus ou moins passés, bien des étoiles, plus ou moins filantes. Tout le monde a encore en mémoire la toque de léopard de MOBUTU SESE SEKO, qui vantait la qualité merveilleuse de la pelouse de son grand stade de Kinshasa, dont le sol était, selon lui, abondamment nourri et fumé par les cadavres de ses opposants.
Beaucoup se souviennent d’IDI AMIN DADA, qui proclamait sa préférence gastronomique marquée pour le cœur de ses ennemis, pas trop cuit si possible, qu’il disait prélever sur leurs carcasses pendues à des crochets de boucher, et de JEAN BEDEL BOKASSA, non exempt de tels soupçons, mais passé à la postérité surtout pour le carton-pâte généreusement recouvert d’or de son trône d’empereur, pour les diamants offerts à VALERY GISCARD D’ESTAING et pour le lien de filiation qu’il revendiquait avec CHARLES DE GAULLE en personne.
EMPEREUR DE CENTRAFRIQUE, C'EST LE PIED !
Il est certain qu’on ne s’ennuyait pas, et qu’au moins, à cette époque, on savait vivre, que diable, on savait s’amuser. Pas comme les jeunots, qui ne savent plus être dictateurs avec fastes. Tiens, même que FRANÇOIS VILLON, s’il n’était pas mort trop jeune, aurait certainement aimé composer une ballade : « Mais où sont les dictateurs d’antan ? », qu’il aurait intitulée Ballade des Diables du temps jadis, et que GEORGES BRASSENS aurait mise en musique, et que tout le monde fredonnerait dans la rue, va savoir.
Plus récemment, nous pûmes essayer, dans une génération plus « lancée » de tailleurs avant-gardistes, des modèles plus ou moins seyants de dictateurs à la page, qui eurent pour jolis noms VLADIMIR KHADAFI, SADDAM POUTINE, HAFEZ EL MOUBARAK, HOSNI BEN ALI, ALI ABDALLAH ASSAD, enfin, je ne sais plus très bien, je finis par tout mélanger. Je note quand même qu’il y a beaucoup de noms arabes dans les derniers Satans dénoncés par l’Occident.
Un Russe (VLADIMIR POUTINE) et un Vénézuélien (HUGO CHAVEZ) ont bien tenté de s’immiscer frauduleusement dans le défilé de mode, mais ils ont été rapidement démasqués. Trop visiblement, ils déparaient dans la collection : ils n’avaient pas assez de sang sur les mains. On me dit qu’on est sans nouvelles de ROBERT MUGABE (Zimbabwe), qui aurait pu les aider à « recoller au peloton », si les médias ne l’avaient pas lâchement abandonné à son sort obscur de potentat provincial.
On espère, pour le prochain défilé, que seront satisfaites les demandes de messieurs OBIANG (Guinée équatoriale), SASSOU NGUESSO (Congo Brazzaville), OMAR EL BECHIR (Soudan), ALI ABDALLAH SALEH (Yemen), et qu’ils seront autorisés à défiler pour présenter leurs modèles sur la scène internationale.
Mais trêve de plaisanterie, tous ces chefs d’Etat dénoncés à longueur de colonnes dans les journaux occidentaux occupent nos médias pour une raison précise : ils incarnent le Mal. Ce sont tous de grands diables. Et qu’on se le dise, l’Occident a besoin de « Grands Diables ». Car, qu’on se le dise, nul ne saurait disputer à l’Occident l’appellation de « camp du Bien ».
Et rien de tel qu’un « Grand Diable » pour donner force et crédibilité au camp du Bien. C'est bien connu, le Bien a besoin d'un Mal bien identifié pour exister en tant que Bien. A cet égard, la grande erreur des Occidentaux est d'avoir fait disparaître SADDAM HUSSEIN. D'abord parce qu'ils ont perdu un repoussoir, qui était quand même bien commode, ensuite parce qu'ils n'ont plus la maîtrise de rien dans l'évolution présente de la situation. Veiller à ce que le Grand Diable reste en bonne santé devrait être la première des préoccupations. Je plaisante.
Mais il est vrai qu'on a cru un temps que GEORGE W. BUSH avait le couvercle de la cafetière complètement fêlé, avec son obsession d’ « Axe du Mal ». Que je sache, il n’est plus au pouvoir, et l’ « Axe du Mal » semble avoir résisté, et mieux que ça, proliféré. On ne lui a même pas demandé son avis. Va savoir, il est peut-être vexé, GEORGE WALKER.
Maintenant, l’axe du mal se nomme Al Qaïda (AQ, et sa petite sœur AQMI, pour Maghreb Islamique, un joli pléonasme, vu l’empressement des musulmans à faire disparaître de leur paysage religieux tout ce qui n’est pas musulman), mais fait des détours par Pyong Yang, Damas, Téhéran (alors, la bombe ou pas la bombe, demandent fiévreusement les journaux ?), sous le regard paternel de Moscou et Pékin. Comme disait SEMPÉ : « Rien n’est simple, tout se complique ».
Le Grand Diable est devenu multiple et insaisissable. Cela veut-il dire que le visage du camp du Bien se fragmente et part en éclats, comme un miroir qui se brise ?
Voilà ce que je dis, moi.
A suivre.
09:00 Publié dans DANS LES JOURNAUX | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : dictateurs, tyrnas, despotes, slobodan milosevic, saddam hussein, kim jong il, kim il sung, nicolae ceaucescu, corée du nord, irak, roumanie, congo kinshasa, mobutu, ouganda, idi amin dada, bokassa, centrafrique, giscard d'estaing, charles de gaulle, françois villon, georges brassens, ballade des dames du temps jadis, muhamar khadafi, vladimir poutine, hosni moubarak, libye, égypte, ben ali, tunisie, george w. bush, axe du mal, obiang, biens mal acquis, sassou nguesso, omar el bechir, soudan